Antoine de Saint Exupéry raconté
Saint-Exupéry, grand témoin de son époque
Saint-Exupéry a souvent exercé ses talents littéraires dans les journaux. Confronté aux drames du siècle, il a porté sur les événements un regard pas toujours clairvoyant mais toujours profondément humaniste.
Saint-Exupéry reporter – Extrait
Après la période intense de l’Aéropostale qui l’a amené d’aventure en aventure en Afrique et en Amérique du Sud, Antoine de Saint-Exupéry aborde la trentaine dans une position pour le moins délicate. Entre 1931 et 1933, en effet, la compagnie est mise en liquidation, victime de la crise et de scandales politico-financiers, pour être finalement rachetée et intégrée à la nouvelle compagnie Air France.
Saint-Exupéry, qui a traversé tant de déserts aux commandes de ses avions, expérimente cette fois la traversée du désert au sens professionnel du terme. Il devient pendant quelques mois pilote d’essai pour Latécoère mais cette expérience tourne court après l’amerrissage raté d’un prototype dans la baie de Saint-Raphaël fin 1933. Désormais, sa vie d’aviateur s’écrira en pointillé, il gagnera sa vie en œuvrant pour la communication d’Air France.
Après l’obtention du prix Femina pour Vol de Nuit, en 1931, Saint-Exupéry fait désormais partie du milieu parisien des lettres. Pourtant, sa carrière de romancier tourne elle aussi au ralenti et il ne publiera pas de nouveau livre avant 1939. Cela ne l’empêche pas d’écrire, et même d’écrire beaucoup : pour le cinéma, et surtout pour la presse. A cette époque, les grands journaux s’arrachent les signatures prestigieuses… et aventureuses qui font rêver leurs lecteurs, à l’image d’un Malraux ou d’un Kessel. Saint-Exupéry a l’avantage d’être à la fois un écrivain célèbre et un pilote populaire. Cela fait de lui une plume recherchée. D’autant plus recherchée que le public se passionne pour les histoires d’aviation et pour les exploits des pilotes qui rivalisent de courage pour battre des records et franchir de nouvelles limites. C’est comme ça qu’à partir de 1932, il multiplie les collaborations journalistiques. Saint-Exupéry trouvera avec ces piges un bon moyen de compléter ses revenus.
Le premier journal qui fait appel à lui est la revue littéraire Marianne, fondée par Gaston Gallimard. Dès le premier numéro, en octobre 1932, Saint-Exupéry collabore au titre dont il restera un contributeur occasionnel jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Ses articles parlent principalement d’aviation et sont pour lui l’occasion de faire revivre sur le papier les années épiques de l’Aéropostale. Il en consacre plusieurs aussi à son ami Mermoz, à l’occasion de ses exploits et après la disparition tragique du pilote en 1936. A côté de cet exercice de chroniqueur, d’autres journaux vont bientôt lui demander d’aller sur le terrain pour faire des reportages.